Souvenirs d'un vieux Doc




     Souvenirs de ma pratique médicale
     comme médecin de famille
     dans la ville de Québec.

vendredi, septembre 01, 2006



Égoïsme médical

Un brave cultivateur se présente au bureau et me raconte son histoire; « Je viens de la Beauce, me dit-il, je préfère parler à un médecin de la ville, parce que je suis certain, qu’en agissant ainsi, personne dans mon village ne sera au courant. Mon épouse vient de décéder à l’hôpital Robert Giffard (centre hospitalier pour aliénés) où elle avait été hospitalisée pendant plus de vingt ans. Durant tout ce temps, sous les sévères consignes de mon curé, je n’ai eu aucune activités sexuelles. Mais aujourd’hui, je suis libre et j’aimerais sortir avec la maîtresse d’école de mon village. C’est une femme intelligente, très belle qui a la réputation de faire l’amour d’une façon des plus excitante à un point tel que ses deux maris sont morts durant une relation sexuelle. »

J’essaie de lui faire comprendre que mourir lors d’une relation sexuelle est un fait assez fréquent et qu’il n’est pas nécessairement en corrélation avec les acrobaties, les manœuvres et les manipulations érotiques. Mes arguments n’ont pas changé ses appréciations sur les capacités aphrodisiaques de sa fameuse maîtresse d’école. Il continue à m’exposer ses inquiétudes, en ces termes : « Ayant été abstinent pendant de nombreuses années, j’ai peur de ne pas être à la hauteur de la situation. Pourriez-vous me prescrire une pilule qui me permettra d’avoir une érection digne d’un homme et cela à chaque fois qu’il sera nécessaire. Mes amis m’ont dit que cette pilule existe réellement. »

Je lui explique que ce médicament n’existe pas (à l’époque le viagra n’était pas sur le marché) et qu’il devra se contenter de pratiquer avec l’espoir que ses efforts seront un jour comblés. À ma grande surprise, il me traite d’incompétent, d’ignorant et ajoute que, si je connais la séduisante et souhaitable pilule, je ne suis qu’un misérable égoïste qui refuse de partager les bienfaits que la science nous prodigue. Il refuse même de me payer mes honoraires.

Finalement, il me paie mon dû et me quitte en bougonnant pour sa Beauce natale.

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