Souvenirs d'un vieux Doc




     Souvenirs de ma pratique médicale
     comme médecin de famille
     dans la ville de Québec.

vendredi, septembre 01, 2006



Me rendant à mon bureau par un bel après-midi d’été, je rencontre un ancien patient qui, d’un air joyeux me dit : « Doc! Je m’en vais boire ma femme ». Devant une telle affirmation, stupéfait, je lui demande des explications. «

Ma femme est morte ce matin, me dit-il, et je l’ai vendue à l’université pour cinq piastres. Ils sont même venus la chercher dans son lit sans aucun frais Son corps va servir à la dissection pour les étudiants en médecine. Avec cet argent (à cette époque la bière se vendait environ dix sous le verre) je me rends à la taverne festoyer son décès avec mes amis. »

Il est vrai que son épouse était une femme de mœurs légères. De la rue, on la voyait souvent à sa fenêtre revêtue légèrement et dans une attitude voluptueuse. Émile Zola aurait pu s’en inspirer pour écrire les vers suivants :

« La blonde et chère enfant, à la fenêtre assise,

De ses cheveux livrait les boucles à la brise,

Et, penchée en arrière, à mes yeux découvrait

Son sein demi voilé qu’un soupir agitait »


J’ai appris quelques jours plus tard, que les sœurs de la défunte, avaient remboursé l’université, fait célébrer des funérailles et inhumer leur sœur. Maintenant elles peuvent dire avec Pierre de Ronsard :

« Ainsi en ta première et jeune nouveauté,

Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté,

La Parque t’a tuée, et cendre tu reposes,

Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs,

Ce vase plein de lait, ce panier de fleurs.

Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses. »



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